Il y a quelques semaines, une amie passant par mon atelier s’est étonné d’y voir une pile entière d’actes d’état civil : « mais que fais-tu, toi, avec des actes de naissance ou de mariage ? » La réponse, si elle peut paraître évidente pour les agents d’état civil ou les archivistes, mérite à mon sens d’être explicitée … pour briller en soirée, lorsque les terrasses réouvriront !
Un encadrement légal
Tous les actes d’état civil (acte de naissance, décès, mariage) mais également les délibérations des conseils municipaux doivent être produits de sorte à garantir la fiabilité / non falsification des documents mais également leur conservation à des fins d’archive …
Par conséquent, le législateur a encadré leur rédaction, impression et conservation.
Ainsi, par exemple
- décret n° 2010-783 du 11 juillet 2010 précise les règles sur la tenue des registres administratifs des communes et des structures intercommunales.
- circulaire IOCB1032174C du 14 décembre 2010 précise ces régles
- décret n° 1997-852 modifie un décret de 1962 sur les règles relatives à l’établissement et la conservation des actes d’état civil
- La norme ISO 14416 établit un cahier des charges pour la réalisation de reliures à l’usage de bibliothèques et archives (matériaux & techniques)
Si vous souhaitez en savoir plus le conseil général du Bas Rhin a rédigé une fiche que je trouve plutôt explicite
Les actes d’état civil doivent être reliés à minima tous les dix ans. Pour les registres de délibération, le délai dépend de la taille de la commune (tous les 5 ans si <1000 habitants, tous les ans sinon)
Dans les deux cas, la reliure doit être une reliure traditionnelle cousue, utilisant des matériaux stables dans le temps
Des normes encadrent également le type d’encres utilisées, l’impossibilité de « supprimer » des pages (évidemment) ou l’obligation de conserver ces registres en double. Une dématérialisation sous certaines conditions est possible mais n’aura qu’une valeur de « copie »
En pratique ?
Les feuillets d’état civil et les registres de délibération sont toujours imprimés sur des feuilles de format A4, parfois en recto-verso. Il faut donc dans un premier temps « re-créer » artificiellement des cahiers.
Cela se réalise par un surjet, c’est à dire une couture en zigzag le long d’un petit paquet de 10 feuilles
Le surjet peut se faire à la main, mais depuis que j’ai Lorette à mes cotés, j’apprécie de le faire à la machine, c’est beaucoup plus rapide!Puis les cahiers sont cousus sur lacettes, le corps d’ouvrage est endossé dans un étau, le dos est renforcé par des krafts et les couvertures sont montées
Lors de chacune de ces étapes, les matériaux utilisés, en particulier la colle, sont neutresEnsuite vient la préparation des pièces de titre. Contrairement à titrage « directement » sur le dos, celui-ci se fait à part, sur un petit morceau de cuir ou de toile qui fait exactement la taille du dos. La taille de chaque caractère dépend donc de la largeur du dos (et de la quantité de lettre de chaque ligne).
Le titre est ensuite doré, au film or, soit par dorure à la main soit par dorure à la presse (dans la photo ci-contre, vous voyez un composteur utilisé pour une dorure à la presse : i.e un seul coup de presse pour toutes les lignes).Un dernier coup de presse à percussion pour emboiter le corps d’ouvrage et sa couverture, puis après séchage le registre passera plusieurs heures sous presse avant de retrouver sa mairie d’origine.
Maintenant, vous savez que les registres et Actes d’Etat civil sont reliés à la main et que ce n’est pas encore un coup du très fameux lobby des relieurs, mais pour des raisons de conservation et d’archivage.
On appelle cela de la « reliure courante », et moi j’aime bien l’idée de contribuer à ma petite échelle à faciliter le travail des généalogistes !